Proposition de loi relative à l'ouverture à la concurrence du réseau de bus francilien de la RATP Discussion générale
Madame la Présidente/Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,
L’ouverture à la concurrence d’un réseau de bus, plus largement d’un service de transport, n’est jamais anodin.
Les conséquences sont d’importance pour les personnes qui y travaillent, mais également celles qui l’utilisent au quotidien.
C’est aussi un moment particulier pour les cédants et ceux qui récupèrent le service.
Nous devons donc exercer une vigilance accrue afin que les bénéfices pour tous soient au rendez-vous.
Disons-le, cette proposition de loi arrive au bon moment.
Le contexte est particulier : la perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 prévus pour cet été, les tensions persistantes en matière de recrutement par la RATP de conducteurs de bus, la force et la complexité d’un réseau très important à ouvrir à une date fixe unique.
Les craintes sont légitimes et nous les entendons.
Je salue donc le travail qui a été effectué en Commission de l’Aménagement du territoire et du Développement durable.
Je sais cette proposition pensée en concertation avec les acteurs du dossier afin de trouver les solutions les mieux adaptées à la situation.
C’est ça le travail du législateur !
Cela donne en tout cas un texte équilibré, au service des Français.
L’ouverture à la concurrence n’est bien sûr par remise en cause, au contraire, ce texte fait le choix d’accompagner le processus.
Dans un premier temps, et je pense qu’un consensus existe au sein de la chambre haute, il était important d’apporter de la flexibilité dans l’ouverture à la concurrence.
L’article 4 s’y attelle en ouvrant la possibilité d’étaler ce processus sur 24 mois.
Échelonner l’ouverture à la concurrence dans un temps plus long permet de laisser la place aux questions de stabilité et de maintien du service public, ainsi qu’à celles relatives au volet technique.
C’est une position de bon sens et qui devrait faciliter les transferts divers prévus dans ce texte.
Évoquer la question des transferts du service de réseaux de bus me permet d’aborder le second point qui me semble fondamental : les conditions de ces transferts pour les salariés.
Plusieurs articles du texte nous proposent d’organiser le transfert des contrats de travail, de donner un délai supplémentaire d’information pour le salarié quand cela se passe, d’ouvrir la possibilité au volontariat de transfert sur d’autres sites tout en ne forçant personne à la mobilité ou encore de respecter les règles particulières à certains travailleurs notamment les travailleurs de nuit.
Ce paquet de solutions est une bonne nouvelle.
N’oublions pas que ce sont presque 20 000 personnes qui sont concernées dont plus de 15 000 conducteurs de bus.
De manière générale, la préservation des acquis sociaux des employés aura un effet positif.
La représentation des salariés dans ce processus est un atout pour assurer une ouverture efficace et simplifiée.
En effet, si l’ouverture à la concurrence est une bonne chose, comme je l’ai rappelé, nous devons être attentifs à la mise en œuvre qui peut avoir des conséquences importantes pour les agents et les usagers.
Nous disposons d’exemples locaux, notamment en Seine-et-Marne, lorsque la première salve d’ouverture à la concurrence a été lancée pour les bus de la grande couronne.
A Melun, selon la délégation de service public n°18 établie par Île-de-France Mobilités, un appel d'offres a été lancé afin de désigner une entreprise pour une durée de cinq ans.
Transdev a remporté le lot dont elle était déjà délégataire. Cette situation aurait pu rassurer les acteurs locaux dont j’étais à l’époque.
Pourtant, en septembre 2021, les chauffeurs du réseau de bus du Grand Melun, puis de Sénart, Fontainebleau, Bussy, Lagny, se sont mis en grève, pendant plus de 8 semaines, dénonçant les nouvelles conditions de travail issues de la réorganisation de l’offre consécutive au nouveau contrat passé entre IDFM et Transdev dans le cadre de l’ouverture à la concurrence.
De même, en 2022, IDFM a attribué l'exploitation de l'offre de transport pour le réseau de bus du Pays Briard à Keolis, succédant à Transdev au 1er janvier 2023.
Depuis cette date, l'offre de transports proposée s'est dégradée portant préjudice aux usagers. Point de grève ici, mais des courses supprimées, des arrêts non desservis, des retards quotidiens.
Plus récemment encore, dans la Communauté de communes Moret Seine et Loing, l’application, depuis le 1er août, de la nouvelle délégation de service public issue de la procédure de mise en concurrence révèle de nombreux dysfonctionnements.
Le travail d’accompagnement et de sécurisation des agents, porté par la proposition de loi, est un élément important qui permettra une ouverture à la concurrence plus apaisée.
En effet, et c’est mon dernier point, il est essentiel que l’ouverture à la concurrence ait des effets positifs sur les usagers qui ne peuvent pas subir des annulations, des retards et plus globalement un service public dégradé.
Au-delà de la continuité, les franciliens ont grandement besoin d’une qualité de service qui malheureusement en ce moment s’effrite.
Pour toute ces raisons, et surtout les adaptations qu’elle prévoit, le groupe Les Indépendants votera en faveur de cette PPL et restera attentif aux enjeux que l’ouverture à la concurrence du réseau de bus francilien fait naître et aux espoirs qu’elle suscite.